Quand il fait triste Bertha chante

Bertha, ma mère


             Je vous parle de Bertha.
             Bertha est morte.
             Cette phrase existe, je la répète pour douter de chaque mot. Pour revenir au passé, à l’enfance, pour renouveler le dialogue, faire le tour des histoires et des silences. J’apprends la leçon d’une mère à un fils, et la leçon d’un fils à sa mère. Ce lien si fort a fait de nous des êtres d’étincelles. Comment réparer l’outrage qu’est la mort sinon mettre en musique ces mots qui ressemblent à une lettre d’amour à la mer, une berceuse à la mère morte ? Existe-t-il une prophétie qui projette un jour le fils dans la peau de la mère ? Des images envahissent ma mémoire : une mère aimante et belle, un parfum de tilleul familier, le goût de la terre natale, et ce bout de ciel bleu.
             La voix de Bertha parle en moi.
             Ses yeux me fixent.


             Je suis désormais ma mère.